Predator
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Posté le:
30 Avr 2014, 16:29 |
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Bonjour à tous
J'ai reçu un appel d'une stagiaire que j'ai formé au SST.
Je lui ai demandé le récit de son expérience et l'autorisation de le diffuser.
Comme elle, je suis fiers de ce qu'elle a accomplie
Citation: |
Retour d’expérience de Chistine L. formée au SST le 27 février 2014
Comme convenu, voici le récit de ce qui s’est passé le samedi 12 avril 2014.
Il était environ 10h15, je jouais au badminton en double avec notamment mon mari, lorsque nous nous sommes rendu compte qu’il se passait quelque chose d’anormal.
Un des joueurs du terrain d’à côté était assis sur un banc, torse nu, le visage blême (Paul, 49 ans), un de ses amis essayait de l’aider (Philippe). Il a appelé à l’aide Maurice, notre coach.
Je me suis tournée pour regarder si Maurice arrivait mais rien. J’ai attendu quelques secondes espérant que quelqu’un de plus expérimenté que moi s’avance mais rien.
Je suis allée voir Paul de plus près, Philippe lui parlait mais il ne répondait pas, il avait le regard vide. J’allais suggérer de l’asseoir par terre, quand il est tombé. J’ai eu juste le temps d’amortir sa chute.
Nous l’avons éloigné un peu du mur et du banc. Je n’ai pas eu le temps de l’examiner, son corps s’est raidi et il est devenu tout bleu. Il avait arrêté de respirer. Inutile d’approcher son visage pour vérifier, c’était manifeste.
Immédiatement, j’ai commencé le massage cardiaque, je me suis mise à compter pour garder le fil, je n’ai pas eu le temps de vérifier l’heure. J’avais entendu quelqu’un parler d’appeler les secours, le réseau est mauvais dans ce coin du gymnase, je me suis concentrée sur Paul.
J’ai crié à mon mari d’aller chercher le défibrillateur. Par chance, nous étions passé devant quelques minutes plus tôt, il savait exactement où il était. Je n’avais pas de nouvelles des secours, je ne savais pas s’ils avaient été appelés, j’ai dit à mon mari de le faire dans le doute. Mon esprit bouillonnait, j’essayais de me souvenir de tout ce qu’on avait vu en stage, je ne voulais rien manquer.
Philippe a voulu s’occuper du bouche à bouche. Je l’ai laissé faire tout en le guidant. « Attends que j’aie fait mes 30 pressions puis deux insufflations, pas trop fort, tire bien la tête en arrière pour dégager les voies respiratoires » C’était difficile. Paul avait beaucoup transpiré, ça glissait. Mon mari est revenu avec le défibrillateur. Vu que Paul n’avait déjà plus de t-shirt, nous n’avons pas eu à l’enlever, c’était toujours ça en moins. Nous avons placé les patchs comme indiqué sur le schéma. Le défibrillateur nous a indiqué de nous reculer, a choqué Paul une fois. Nous avons continué le massage cardiaque, Paul s’est remis à respirer. Les respirations étaient fortes et bruyantes, pas de doute là non plus.
Nous avons arrêté et mis en PLS mais il a de nouveau arrêté de respirer. Nous l’avons remis sur le dos, repris le massage. De l’eau et du sang sortaient de sa bouche, à chaque fois que j’appuyais, j’essayais de tourner sa tête un peu sur le côté dès que je pouvais. Petite pause : le défibrillateur nous a indiqué de nous écarter mais n’a pas choqué cette fois-ci. Reprise du massage cardiaque. Au bout d’un temps, j’ai senti que je n’étais plus efficace, la poitrine ne s’enfonçait plus suffisamment. Mon mari a pris le relai. Il n’a aucune formation de secouriste mais je n’avais pas d’autre volontaire sous la main, je lui ai montré rapidement comment se placer et où appuyer. Il s’en est très bien sorti. Je rythmais en comptant, Philippe continuait le bouche à bouche. Paul a repris connaissance, nous avons eu juste eu le temps de le mettre un peu sur le côté, il a vomi. Il est resté comme ça dans un semblant de PLS, jusqu’à ce que les pompiers arrivent. Nous nous sommes tous écartés pour les laisser travailler. Ils l’ont notamment mis sous oxygène et nous ont posé des questions. Un pompier m’a dit « vous savez que vous avez sauvé une vie aujourd’hui », j’ai pensé, il n’est pas encore sauvé … Quelques minutes plus tard le SAMU est arrivé. Un médecin et deux infirmiers. Le médecin nous a posé beaucoup de questions, notamment sur la durée des évènements, je n’en avais aucune idée. J’ai livré les éléments dont je me souvenais, les autres ont raconté le reste.
Paul a de nouveau fait un arrêt cardiaque. Philippe et moi tournions en rond à distance, inquiets. Les autres me disaient que les secours avaient mis plus de 20-25 min à arriver, je n’en savais rien, j’avais perdu toute notion du temps, ça m’avait paru très long. Paul a repris connaissance. Le médecin est venu voir son épouse quelques temps plus tard pour lui dire que son mari était stable et qu’ils allaient l’emmener à l’hôpital. Je suis partie, complètement sonnée. Quand je suis remontée tout le monde m’a félicitée. Je ne comprenais pas pourquoi. Toute la journée j’ai ressassé ce qu’il s’était passé, me disant que j’aurais pu faire mieux, que j’avais raté la PLS, que j’aurais dû pousser Philippe qui me gênait un peu. La vérité est que je ne voulais pas rester seule avec la vie de Paul entre mes mains, plusieurs fois j’ai cru qu’il allait mourir devant nous. J’ai passé le reste du week-end sans aucune nouvelle, j’avais le cœur serré.
Lundi, j’ai finalement eu Paul au téléphone, il était bien vivant ! Il a dit que je l’avais sauvé. Je n’en revenais pas, nous étions plusieurs à l’avoir aidé, mais tout le monde lui a dit que j’avais mené le sauvetage. Je ne m’en suis pas vraiment rendu compte, personne n’a vu qu’à l’intérieur j’étais au bord de la panique.
J’ai juste fait ce que nous avions appris en formation et même pas de manière parfaite. J’ai su plus tard que les pompiers avaient mis exactement 15 min à arriver. Les médecins ont dit que ce qui avait sauvé Paul était : la rapidité avec laquelle nous étions intervenus, le défibrillateur et le massage cardiaque, un trio essentiel pour que ses chances de survies s’améliorent. Sans ça il serait mort dans ce gymnase.
Sa femme et ses enfants sont très choqués, sa fille de 18 ans a décidé de suivre une formation de secouriste. Depuis, il a été opéré (on lui a fait un pontage), il est très fatigué, il va bien, il est heureux d’être vivant. Moi aussi j’en suis heureuse, c’est ma récompense. J’ai eu tellement peur.
J’écris ces mots en espérant qu’ils permettent d’avoir une idée de l’expérience que j’ai vécue, j’avoue que c’est un peu flou dans mon esprit, j’ai eu du mal à organiser ce récit.
S’il peut aider même juste quelques personnes à comprendre à quel point cette formation de SST est importante alors ce ne sera pas en vain.
Les prénoms originaux ont été remplacés |
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_________________ PFG1, PFG2 |
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