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29 Nov 2015, 20:23 |
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Vendredi, avant le Samu : « Que faire avec seulement de l’oxygène ! »
Un anesthésiste-réanimateur, sur place avant les secours, dit n’avoir pas pu tenter de sauver deux blessés, faute de matériel.
Par Benoît Le Corre Journaliste. Publié le 18/11/2015 à 18h41
Nous avons reçu dimanche un mail d’un anesthésiste-réanimateur, Michel Bonnot, ancien de Médecins du monde, habitué à soigner des « blessures de guerre ».
Son verbe est désespéré : vendredi soir, il s’est retrouvé impuissant face à deux blessés graves à la terrasse de La Bonne Bière, dans le XIe arrondissement de Paris, près de la place de la République.
Habitant le quartier, il a entendu les coups de feu et est allé voir :
« Deux hommes étaient morts. Sans appel.
Deux [autres personnes] agonisaient. Avec un sapeur en civil, nous avons essayé de réanimer la première. Massage, bouche-à-bouche... l’autre allongée sur le côté respirait et parlait à faible voix... j’ai pensé qu’elle allait s’en sortir seule.
Que le temps a semblé long d’attendre l’arrivée des camions de sapeurs ! Vingt minutes, c’est une éternité !
J’ai demandé d’urgence le renfort du médecin. Il n’y en avait pas. Le brigadier m’a dit que le Samu arrivait. Alors j’ai demandé du matériel pour commencer le déchocage [d’une des deux personnes] : pour la perfuser et l’intuber afin de la mettre sous assistance cardio-respiratoire.
Il n’y avait rien ! Seulement de l’oxygène, des couvertures de survie et des garrots pour les membres. Même pas de morphine pour les blessés qui hurlaient de douleurs ! [La personne] a alors lâché et est partie entre mes mains… [...]
La deuxième [...] a commencé à sombrer... nous l’avons massée et ventilée au masque... en vain, elle est partie aussi... Que pouvions-nous faire de plus avec seulement de l’oxygène ! Alors on a empilé son corps sur ceux des autres, à côté du bar... cela m’a rappelé les charniers en Bosnie. [...]
Je dirais que tous les blessés graves de la Fontaine-au-Roi sont morts. Certains auraient pu être sauvés. Seuls les blessés légers (balles dans les jambes ou bras) sont survivants. »
Ce témoignage va à l’encontre de ce qu’on a pu lire ce week-end. La presse a plutôt relayé l’idée d’une exemplarité des services de secours.
Il pose deux questions.
1 / Les secours sont-ils préparés à une situation de guerre sur le territoire ?
Selon Michel Bonnot, les rafales d’armes automatiques et les « blasts » de bombes, comme ce fut le cas vendredi, sont les composantes d’une situation de guerre. Par mail, il maintient que les secours français ne sont « pas du tout profilés à la chirurgie de guerre » :
« Il faut tout repenser. La plupart de nos “ambulances” ne savent transporter que des entorses, pas des corps déchiquetés par la grenaille. »
On a contacté le docteur Gérald Kierzek, de l’Hôtel-Dieu, pour recueillir son avis. Tout d’abord, il tient à préciser que la situation connue vendredi soir est d’une ampleur jamais atteinte :
« C’était le pire des scénarios. »
Mais lui ne dira pas que nous n’étions pas prêts. Au contraire.
« Le matin même, nous faisions des exercices de préparation à des attentats multisites. »
Plan blanc
A l’entendre, les sapeurs-pompiers et les Samu ont coordonné leurs actions. Les hôpitaux ont réussi à absorber les marées de blessés graves, légers ou psychologiques. Le plan blanc – de mobilisation des hôpitaux qui consiste à préparer ces derniers à recevoir un grand nombre de blessés – s’est déroulé comme prévu.
Pour le site institutionnel de l’AP-HP, le bilan est globalement positif.
« 433 personnes ont été prises en charge à l’AP-HP dans le cadre des attaques terroristes. [...] Sur les 80 personnes admises le 13 novembre 2015 en situation d’urgence absolue :
48 personnes ne relèvent pas ou plus aujourd’hui d’une surveillance intensive en service de réanimation,
29 personnes sont toujours en service de réanimation,
3 personnes sont décédées.
268 personnes sont déjà sorties des hôpitaux de l’AP-HP. »
2 / Pourquoi les pompiers n’ont-ils pas le matériel dédié ?
Comment expliquer alors le témoignage de Michel Bonnot ? Ce que le réanimateur regrette, dans son message, c’est :
« Pourquoi ne pas donner aux véhicules de sapeurs-pompiers une trousse d’urgence et de réanimation en dotation, avec morphine et perfusions, afin que les médecins présents sur les lieux des attentats puissent faire leur travail ? »
Ainsi équipé, il aurait pu s’en servir et tenté de secourir, dit-il, les deux personnes qui ont succombé à leurs blessures.
Protocole
L’organisation des secours en France respecte un protocole. Les secours non médicalisés, comme les sapeurs-pompiers, se rendent le plus rapidement sur place. Ceux-ci disposent du matériel nécessaire aux soins de premiers secours (des outils comme un défibrillateur ou une bouteille à oxygène).
Si les blessures nécessitent une intervention médicale, des secours adaptés sont envoyés ensuite. Comme le Samu, dont les ambulances médicalisées sont équipées comme des vrais hôpitaux. C’est en leur habitacle qu’on trouve le matériel que souhaitait avoir à disposition Michel Bonnot.
Gérald Kierzek :
« Je comprends sa détresse. C’est un truc insupportable. D’être là et de ne rien pouvoir faire. Mais je pense que ce message, c’est plus un cri du cœur d’un être humain devant l’horreur et il serait injuste d’en conclure que nos équipes n’étaient pas prêtes. Elles ont répondu présentes avec efficacité et solidarité. »
http://rue89.nouvelobs.com/2015/11/18/vendredi-avant-samu-faire-seulement-loxygene-262131 |
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VERDI 14
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Posté le:
30 Nov 2015, 18:25 |
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La question n'est pas de savoir si les équipes sont prêtes ou pas , mais de savoir si le matériel à disposition est suffisant ou pas .
On s'attaque à un monstre du médico-légal , parce que des médecins sur place c'est rare , et qui veulent faire des gestes c'est encore plus rare .
On soulève un liévre avec la question pourront nous être formés à utiliser CE matériel et CES techniques médicales ou paramédicales ?
En l'état des choses non , tant que chacun sera dans son près carré .
De plus en état de guerre les blessés sont stabilisés sur place par des gestes invasifes puis évacués vers le trauma center rapidement par moyen aérien , dans la plus part des cas ils sont polytraumatisés ... Tiens ça me rappel un certain PHTLS .
Et pour rappel en situation de multi victimes , il y a dans un premier temps un tri secouriste , puis médical , puis une évacuation après des soins ... à la française quoi ! |
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Tonic
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Posté le:
01 Déc 2015, 16:30 |
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Cet anesthésiste-réanimateur lance une polémique qui n'a pas lieu d'être... il sait très bien comment fonctionne notre système de secours, qui est certes perfectible mais qui fait preuve objectivement d'efficacité.
Pourquoi de nombreux SDIS ont-ils supprimés les caisses médicalisées plombées qui étaient présentes au sein de leurs VSAV : un coût et une logistique astronomique (péremption des médicaments etc.) pour une utilisation quasiment inexistante. Notamment dans les centres villes ou les moyens médicalisées se présentent sur les lieux très rapidement. Cette utilisation est probablement plus adaptée en milieu très rural (et encore faudrait-il qu'un médecin soit présent sur place, et compétent en médecine d'urgence...)
Paris, capitale, les moyens médicaux sont nombreux et arrivent rapidement sur place. Évidemment, faire intervenir 130 AR simultanément est inenvisageable. Il faut bien prendre en compte que cette situation demeure exceptionnelle. Entendre ce médecin se plaindre du délai d'intervention est perturbant...s'attendait-il à voir 50 VSAV se présenter sur les lieux en moins de 5 minutes? On doit s'estimer "heureux" que les particularités de la BSPP et le maillage territorial de Paris et sa petite couronne permettent une intervention massive des secours. Un SDIS quelconque aurait eu beaucoup plus de mal à mobiliser autant de moyens en matériels et effectifs aussi rapidement.
Après avoir visualisé une vidéo sur M6 dans laquelle on voit un PSE arriver en premier sur les lieux face à 30 personnes au sol sur une terrasse de bar dont probablement une quinzaine en ACR : J'ai observé le professionnalisme du chef d'agrès notamment qui a fait preuve d'un sang froid exceptionnel et d'un grand calme et qui déploie ses équipes efficacement. J'ai observé la rapidité de la mise en place d'un PRV/PMA afin de procéder rapidement au tri des victimes. Comment pourrait-on se permettre de jeter la pierre?
Doit-on devenir, nous sapeurs-pompiers, des infirmiers qui perfusent, intubent : Évidemment que non...à moins de faire trois ans d'études, des stages, des spécialisations.. mais je ne pense pas que ce soit la solution.
Ce médecin, déçu de ne pas avoir pu porter secours dans des façons optimales (alors que la situation ne peut permettre de porter secours à tout le monde, qu'il faut faire des choix malheureusement et qu'il est impossible de prendre en charge efficacement toutes les victimes) porte l’opprobre sur le manque de matériel et de qualification des secouristes qui ne savent que "prendre en charge des entorses"... : commentaire imbécile, insultant et déplacé!
Nos politiques devraient plutôt se concentrer sur une restructuration des secours en France et sur une meilleure coordination de ces derniers et réfléchir à des moyens d'éviter la survenance de ces attentats plutôt que de chercher uniquement les moyens d'intervenir post-attentat. |
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